Par André Lafarie
Dernière mise à jour : décembre 2018

1. Acteurs et rôles respectifs

1.1. La maîtrise d’ouvrage

  • Définition et rôles de la maîtrise d’ouvrage 

La loi MOP donne une définition de la maîtrise d’ouvrage : « le maître de l’ouvrage est la personne morale pour laquelle l’ouvrage est construit. Responsable principal de l’ouvrage, il remplit dans ce rôle une fonction d’intérêt général dont il ne peut se démettre ».

Si cette définition est, en l’occurrence, applicable aux projets de bâtiments et d’infrastructures, des missions relevant de la maîtrise d’ouvrage sont clairement transposables à l’ensemble des projets : analyse de l’opportunité et de la faisabilité, définition du programme au regard des besoins, fixation de l’enveloppe financière prévisionnelle, choix du mode de réalisation, conclusion des contrats (études ou travaux), vérification de la qualité des livrables, réception du projet.

Cette maîtrise d’ouvrage est marquée par les rôles respectifs et complémentaires des élus et des techniciens : les élus fixent les objectifs stratégiques, valident les choix techniques et les arbitrages, tandis que les techniciens proposent une stratégie opérationnelle et en assure le suivi et le contrôle tout au long du projet.

De fait, une conduite de projet efficace doit favoriser le dialogue aux étapes clefs entre ces deux composantes de la maitrise d’ouvrage (commande, diagnostic, choix d’une solution, décision de faire, arbitrages en cours de projets et une information en continu).

  • Le rôle particulier du chef de projet

Chargé de la coordination de l’ensemble du processus, le chef de projet doit :

  • assurer l’ordonnancement et le pilotage des tâches dans le respect des objectifs publics dont il est le garant,
  • préparer les arbitrages des décideurs (élus ou direction générale) aux différents jalons,
  • assurer la conduite opérationnelle du projet,
  • gérer les interventions des acteurs directs ou indirects.

Parmi ses missions, figurent notamment :

  • l’ordonnancement, qui consiste à définir, par anticipation, les modalités d’action permettant d’atteindre les objectifs publics fixés par les décideurs (élus ou direction générale), ce qui se traduit par :
    • l’établissement d’un planning prévisionnel faisant ressortir l’imbrication des tâches et le chemin critique,
    • l’identification, le plus en amont possible, des acteurs du projet, en distinguant l’équipe projet (acteurs dont la présence est nécessaire en continu) et les contributeurs (acteurs intervenant de manière plus ponctuelle),
  • le pilotage qui comprend le suivi régulier de l’avancement du projet (via un tableau de bord), le reporting à la hiérarchie et aux décideurs, la proposition éventuelle d’ajustements en cours de montage ou de mise en œuvre, la gestion des acteurs et du processus de validation…

C’est le chef de projet qui doit préparer la validation des jalons clefs tout au long du processus d’élaboration et de mise en œuvre du projet :

Ces jalons clefs sont toujours les suivants :

  • la reformulation de la commande (échanges interactifs avec les décideurs),
  • la validation du diagnostic et des enjeux stratégiques,
  • la traduction en objectifs opérationnels (programme),
  • le choix entre des solutions alternatives (critère de choix),
  • la décision de faire,
  • les ajustements du projet en cours de mise en œuvre,
  • la réception du projet avec ses conséquences,
  • l’évaluation du projet.

A l’égard des décideurs, le rôle du chef de projet est de proposer des décisions qui doivent être argumentées (éclairage sur les avantages /inconvénients des solutions, sur les risques éventuels) sur la base éventuellement d’avis internes ou externes.

Dans tous les cas, son action est forcément partenariale, avec deux instances classiques :

  • un comité technique qui doit réunir tous les partenaires internes ou externes dont le rôle sur le projet rend la présence utile aux différentes étapes (en ajoutant, au besoin, les contributeurs intervenant plus ponctuellement) et qui prépare collectivement les décisions et arbitrages relevant du comité de pilotage,
  • un comité de pilotage qui doit réunir les décideurs afin :
    • soit de procéder à des arbitrages ou des validations (jalons intermédiaires ou projets internes),
    • soit de valider les principes du projet qui sera approuvé par les instances délibérantes (jalons principaux, dont la décision de faire).

L’un des rôles essentiels du chef de projet concerne la gestion et le management des acteurs du projet. C’est, en effet, un ensemblier qui doit :

  • déterminer, le plus en amont possible, les acteurs nécessaires à la conception, la mise en œuvre et l’exploitation du projet ;
  • préciser les tâches à accomplir par chacun d’entre eux et les modalités (délais imposés ou négociés, dates d’intervention en fonction des capacités de mobilisation),
  • négocier la mise à disposition des acteurs lorsque ceux-ci ne relèvent pas de son autorité hiérarchique (travail transversal en mode projet/organisation hiérarchique ou verticale) ou de contrats et marchés,
  • générer et maintenir l’intérêt des acteurs pour le projet (diffusion de l’information, valorisation des rôles respectifs, écoute et/ou prise en compte des avis…).

1.2. Les acteurs périphériques

  • Le recours éventuel à un Assistant à Maîtrise d’Ouvrage (AMO) 

Deux types de missions d’assistance peuvent être nécessaires :

  • une assistance générale à la conduite du processus de projet : besoin de coordination ou de gestion pour des projets très transversaux,
  • des missions d’assistance plus spécialisées : besoin de conseils ou d’études ponctuelles (pour des projets complexes ou innovants) dans les domaines techniques, administratifs et juridiques, financiers…
  • Le recours éventuel à des prestataires extérieurs

Tout au long de l’élaboration ou de la mise en œuvre des projets. Il sera fréquemment fait appel à des prestataires extérieurs de toute nature (concepteurs, experts techniques, organismes de réalisation…), qui seront toujours liés à la maitrise d’ouvrage par un contrat.

Afin de parvenir aux meilleurs résultats possibles et pour que la relation soit sereine et efficace, il convient donc de ne pas se tromper sur le choix des prestataires (selon les procédures et les critères adaptés) et de définir clairement les bases de la relation, ce qui interpelle sur la clarté de la commande (cahiers des charges).

2. De nouvelles modalités de montage et de mise en œuvre

2.1. Le recours accru aux partenariats

  • Le développement et la maîtrise des partenariats 

Le recours accru aux partenariats peut s’expliquer par :

  • des contraintes budgétaires de plus en plus fortes pour les acteurs locaux,
  • l’apparition de nouveaux outils, notamment le contrat de Partenariat Public Privé, qui sont cependant encadrés et pas forcément applicables de la même manière sur tout le territoire.

Dans tous les cas, pour les collectivités locales, il est indispensable de conserver une maîtrise de ces partenariats afin de garantir l’atteinte des objectifs publics au mieux des intérêts financiers et budgétaires.

Qu’il s’agisse d’équipements spécifiques ou d’opérations plus complexes, les partenariats public/privé :

  • ne peuvent être appliqués de manière systématique : pour que le partenariat soit envisageable, il doit y avoir un équilibre entre les besoins de rentabilité des opérateurs privés (dépendant du contexte économique local) et les attentes et le niveau d’exigence de la collectivité,
  • doivent être anticipés et maîtrisés, ce qui suppose :
  • d’anticiper la mise en œuvre des partenariats futurs, pour les favoriser (notamment par un dialogue régulier entre les acteurs publics et privés, un échange sur les stratégies et les projets respectifs…) mais aussi pour se donner les moyens de les encadrer et de peser dans la négociation (notamment, pour les acteurs publics, en conservant des contreparties possibles et en conservant une part de souplesse dans le montage),
  • de maîtriser le montage du partenariat sur chaque projet, à la fois en terme de respect des procédures et de rédaction du contrat qui reliera les partenaires et dont la précision sera une des conditions pour permettre de garantir, dans la durée, le respect des objectifs de la collectivité.
  • Les marchés de partenariats

Alors qu’existaient précédemment des contrats de partenariats public/privé (PPP) soumis à un régime spécifique, l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics les intègrent dans le champ de la commande publique.

Un marché de partenariat est ainsi un marché public qui permet de confier à un opérateur économique ou à un groupement d’opérateurs économiques une mission globale comportant :

- Un socle de missions de base dont le titulaire du marché assure la maîtrise d’ouvrage :

1° La construction, la transformation, la rénovation, le démantèlement ou la destruction d’ouvrages, d’équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public ou à l’exercice d’une mission d’intérêt général ;

2° Tout ou partie de leur financement.

- De manière optionnelle, des missions complémentaires :

1° Tout ou partie de la conception des ouvrages, équipements ou biens immatériels ;

2° L’aménagement, l’entretien, la maintenance, la gestion ou l’exploitation d’ouvrages, d’équipements ou de biens immatériels ou une combinaison de ces éléments ;

3° La gestion d’une mission de service public ou des prestations de services concourant à l’exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée.

Le marché de partenariat implique un financement principalement privé pour l’ensemble des opérations à réaliser, même s’il est possible de prévoir un financement public par exemple sous forme d’une participation minoritaire de la personne publique au capital de la société titulaire. La rémunération du titulaire est liée à des critères de performance qui lui sont assignés par l’acheteur pour chaque phase du contrat.

L’ordonnance revoit également les conditions et modalités de recours à ce type de montages.

Le lancement de la procédure de passation d’un marché de partenariat est précédé par :

  • une évaluation préalable des modes de réalisation (EPMR) du projet qui permet à la personne publique de s’assurer que l’outil de commande publique choisi est le mieux adapté,
  • une étude de soutenabilité budgétaire qui intègre tous les aspects financiers du projet.

Sur ces bases, le recours au marché de partenariat n’est possible que sous réserve d’un bilan plus favorable que les autres modes de réalisation (au regard des conclusions de l’EPMR) et d’un seuil minimal, fixé par décret et variable (entre 2M€ HT et 10M€ HT) en fonction de la nature et de l’objet du contrat, des capacités techniques et financières de l’acheteur et de l’intensité du risque encouru.

2.2. Le développement des démarches participatives

  • Un développement progressif de ces démarches 

De manière générale, on assiste depuis maintenant deux décennies à une multiplication des signes d’ouverture de l’action publique vers les citoyens (droit d’accès aux documents administratifs et motivation des actes, droit des habitants à être informés des affaires de la collectivité).

De manière concrète et opérationnelle, cela s’est traduit par la création de procédures ou d’instances de participation des habitants, susceptibles d’intervenir aux différents stades de montage et/ou de mise en œuvre des projets :

  • les enquêtes publiques,
  • l’extension du champ de la concertation,
  • les commissions consultatives des services publics locaux,
  • le conseil de développement,
  • le référendum décisionnel local…
  • Les enjeux et modalités de mise en œuvre de la concertation 

Expression la plus directe de la participation des citoyens au montage et à la mise en œuvre des projets, la concertation présente différents enjeux pour les maîtres d’ouvrages :

  • accroître la clarté et la transparence de l’action publique par une meilleure communication et plus de transparence,
  • permettre un rapprochement du citoyen et un renforcement de la confiance,
  • favoriser le développement d’une responsabilité collective au regard de l’intérêt général,
  • faciliter la réalisation des projets (par la recherche d’une adhésion préalable à un projet co-construit que les usagers peuvent donc s’approprier),
  • renforcer l’efficacité des politiques publiques (la concertation devant permettre d’affiner le diagnostic par une meilleure connaissance des besoins et le cas échéant, un enrichissement du contenu des projets).

Pour autant, la concertation reste, dans tous les cas, un exercice difficile pour différentes raisons :

  • le risque de manque d’intérêt, d’implication, d’esprit constructif de la part des populations concernées, qui peut rendre le dialogue difficile, voire impossible (cas des opposants systématiques…),
  • la confrontation de l’intérêt général et des intérêts privés (avec le phénomène NIMBY : « oui mais pas chez moi »…),
  • la confusion des échelles (difficulté des habitants à se mobiliser pour des dossiers à grande échelle, qu’ils comprennent plus difficilement et qui les concernent moins directement que les projets de proximité),
  • les difficultés de communication (qui, au-delà des phénomènes précédemment décrits, sont aussi souvent liées au peu d’ouverture des techniciens, au langage technocratique, au manque de clarté des supports de présentation…).

Dans tous les cas, une concertation réussie suppose un vrai engagement des élus (qui, au-delà des éventuelles obligations juridiques, sont les seuls à décider de l’ampleur réelle à donner à la concertation) et se prépare, ce qui peut justifier, au besoin, le recours à des prestataires extérieurs pour animer les réunions, préparer des supports adaptés.

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