Par Vincent Chrétien
Dernière mise à jour : octobre 2019

1. Le rôle de l’arbre en ville

1.1. Prise de conscience lente

L’arbre est un des premiers liens à la nature pour les habitants de la ville. En ce sens, il est au cœur des enjeux d’amélioration du cadre de vie urbain par la nature.

Le 20ème siècle a été marqué par une forte diminution de la présence de l’arbre en ville, du fait d’une gestion fonctionnaliste de l’aménagement urbain, concentrée sur le bâti, la réduction des coûts et l’adaptation de la ville à l’automobile. Cette période a été destructrice pour l’arbre de deux points de vue : d’une part, elle s’est soldée par une forte diminution du nombre d’arbres et une dégradation de leur état sanitaire en général ; d’autre part, elle a eu pour conséquence une importante perte des savoirs sur l’arbre urbain qui a contribué à une gestion mettant en péril la santé des arbres.

Depuis les années 80, le processus a commencé à s’inverser avec la montée en puissance des préoccupations environnementales, mais aussi par le rejet des habitants d’un modèle urbain au cadre de vie peu attractif.

1.2. Des fonctions pas encore bien admises par les habitants

La ville reste un milieu agressif pour l’arbre : pollution, salage des rues en hiver, luminosité trop forte ou trop faible, ou encore agressions directes comme des blessures infligées par la circulation automobile ou par l’utilisation de l’arbre comme support.

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1.3. Le changement des mentalités

Pour opérer un changement de culture et de paradigme, préalable nécessaire à toute action de préservation de l’arbre en ville, trois grandes étapes fondamentales semblent nécessaires à une gestion intégrée de l’arbre en ville :

  • Opérer une transversalité dans la gestion verticale actuelle des villes. Repenser la place de l’arbre en ville, et même plus, la notion de « forêt urbaine », permet de remettre en question la compartimentation des responsabilités concernant la gestion du patrimoine arboré et plus généralement de la nature en ville. En effet, cette question se situe à la croisée des problématiques d’environnement, d’accessibilité, d’adaptation au changement climatique, de solidarité intergénérationnelle, d’usage de l’espace public ou de gestion de l’eau.
  • L’arbre n’est pas seulement ce que l’on pense, il est plus que cela. Les fonctions de l’arbre en ville, au-delà de l’ombrage et de l’esthétique restent encore bien souvent méconnues. L’arbre ne doit pas non plus être vu comme une contrainte supplémentaire pour la voirie, la gestion de l’eau en ville ou des réseaux. Il est aussi une participation à une meilleure gestion des eaux pluviales, la régulation des îlots de chaleur urbains, l’amélioration de la qualité de l’air…
  • Placer la Nature au cœur de l’urbanité moderne. Changer la façon d’envisager la place de l’arbre en ville est un préalable indispensable à toute action de préservation. Ainsi, la nature devient l’élément clef d’une urbanité moderne. En tant qu’emblème de la nature en ville, l’arbre est ainsi investi d’une valeur symbolique supplémentaire. Cela vient renforcer la place qu’il occupe au sein de notre imaginaire collectif et enrichir le lien affectif que nous entretenons avec lui. L’arbre est considéré comme un élément identitaire du paysage

2. Les fonctions de l’arbre en ville

2.1. Des fonctions de base

L’arbre un outil efficace contre les ilots de chaleur

L’arbre a une fonction d’ombrage et de régulateur thermique ; un alignement d’arbre peut faire baisser la température de 5 °C en été dans une rue.

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2.2. L’arbre rend de nombreux services

L’arbre, une clé de lecture du paysage urbain. Plus qu‘un objet ornemental, l’arbre crée une ambiance particulière et nous fait prendre conscience des perspectives, des volumes et des hauteurs de la ville. En ce sens, l’arbre est également un facteur d’attractivité. Sa présence augmente d’ailleurs la valeur foncière d’un site.

L’arbre, support du vivant en ville. L’arbre offre un refuge à une faune et une flore diversifiées : champignons, oiseaux, petits rongeurs, insectes, etc.

L’arbre constitue une identité historique et culturelle pour la ville. Il témoigne du passage du temps au travers du changement de son feuillage avec les saisons et durant sa croissance. Il constitue un repère temporel indispensable car immuable et régulier dans des villes plutôt caractérisées par des évolutions arythmiques. Il apporte en ce sens un lien trans-générationnel dans la ville. De plus, l’arbre forme une valeur patrimoniale.

L’arbre, un support de gestion des eaux pluviales et une fonction anti-érosion. L’arbre restitue de façon différée la pluie et évite ainsi la surcharge des réseaux d’assainissement. De plus, ses racines permettent de retenir l’eau mais aussi d’éviter les phénomènes d’érosion et donc de glissement de terrain.

L’arbre, un moyen de limiter les nuisances urbaines telles que le bruit, la pollution, les îlots de chaleur urbains et ainsi d’améliorer la santé des citadins. Les arbres contribuent à diminuer le taux de gaz carbonique, neutralisent les autres polluants atmosphériques (ozone, dioxyde, soufre…) et filtrent les poussières, cendres, pollens et les aérosols. En outre, ils apportent des bénéfices en termes d’économie d’énergie. En été, les feuilles peuvent intercepter jusqu’à 90 % des rayons solaires et en hiver, les arbres dépourvus de feuillage laissent passer les rayons du soleil, tout en gardant un effet de déviation du vent qui arrive sur les maisons, ce qui permet d’atténuer les besoins en chauffage.

Par ailleurs, les plantations d’alignement auraient un effet contre la réverbération des bruits de la circulation automobile par les façades. Enfin, certains arbres sont efficaces en termes de phytoremédiation (dépollution des sols).

L’arbre, facteur de lien social et porteur d’un sentiment de sécurité. On constate que, plus les arbres sont nombreux sur l’espace public, plus l’espace public est utilisé et accueille des activités sociales nombreuses et diversifiées. Les arbres permettent une meilleure appropriation de la ville par les habitants. De plus, il a été démontré que leur présence atténue l’agressivité.

Une fonction nourricière à développer. Fonction délaissée aujourd’hui, elle représente un potentiel important en termes de lien social, puisque les habitants se retrouvent alors autour des arbres fruitiers pour la cueillette.

3. L’arbre et son entretien

3.1. Les plantations

Ouverture du trou

  1. Creuser sur 1m3
  2. Séparer la terre se trouvant à la surface et la terre de fond.
  3. Décompacter la terre de fond.
  4. Remplacer la terre de mauvaise qualité par de la terre végétale.

Préparation de l’arbre

Vous pourrez trouver les arbres sous différents conditionnements.

  • Pour les arbres à racines nues : supprimer les racines qui vous semblent endommagées.
  • Pour les arbres présentés en motte : pour éviter l’étouffement des racines, enlever la tontine ou couper quelques mailles du panier.
  • Pour les arbres en container : dépoter puis démêler les racines.
  • Dans tous les cas : tailler les branches pour donner un équilibre entre le système racinaire et aérien.
  • Puis, praliner les racines surtout si l’arbre vous paraît déshydraté.

Plantation

  1. Mélanger votre terre de surface avec un amendement (par exemple 10 litres de terreau) et une fumure (par exemple 100 g de corne broyée).
  2. Planter votre tuteur pour les sujets en racines nues ou en container (le type de tuteurage peut varier en fonction de l’espèce et des conditions climatiques cf. partie tuteurage).
  3. Former un dôme avec la terre mélangée. Pour délimiter la hauteur du dôme, il faut que, lorsque les racines seront posées dessus, le collet de l’arbre soit au niveau du sol. Vous pouvez coucher un râteau à cheval sur les deux côtés opposés du trou pour vous rendre compte de la limite.
  4. Poser l’arbre sur le dôme.
  5. Pour protéger provisoirement l’arbre du vent, attacher le tronc au tuteur à l’aide d’un collier.
  6. Recouvrir les racines de terre fine (pour un bon ancrage).
  7. Enlever le collier.
  8. Remonter légèrement l’arbre en le secouant puis tasser pour éviter les poches d’air.
  9. Finir de reboucher le trou avec la terre de fond.

Finition

  1. Fixer deux colliers adaptés pour que le tronc ne touche pas le tuteur ou procéder au haubanage s’il s’agit de sujets en mottes ou d’un conifère (cf. partie haubanage).
  2. Réaliser une cuvette de forme régulière autour de l’arbre lui permettant de recevoir environ 50 litres d’eau (en réalité, arroser jusqu’à saturation).

Tuteurage

Le tuteurage concerne les sujets à racines nues et en container.

  1. Choisir un tuteur de taille proportionnelle au sujet.
  2. Le collet de l’arbre doit arriver au niveau du sol. Pour se rendre compte de la taille du tuteur, l’enfoncer dans le trou à 10 cm de profondeur puis placer votre arbre à ses côtés (le collet arrivant au niveau du sol), tracer une marque sur le tuteur à la base des branches puis scier ce dernier à la marque.
  3. Penser à planter le tuteur entre le vent dominant et le tronc.
  4. Fixer les deux colliers sans abîmer le tronc.

Haubanage

Le système de hauban concerne les arbres en motte et les conifères, ceux-ci ne pouvant être tuteurés. Il se réalise après la plantation.

  1. Attacher un collier de mousse au 2/3 de la hauteur de l’arbre.
  2. Planter 3 piquets de façon homogène autour du sujet.
  3. Fixer aux piquets 3 fils de fer (avec un tendeur sur chacun) les reliant au collier.
  4. Tendre les fils de fer de façon à ce que l’arbre soit parfaitement vertical.

3.2. L’élagage

L’élagage consiste à orienter ou limiter le développement d'un arbre. On distingue de nombreux types d'élagage : l'élagage sylvicole, l'élagage fruitier, la taille raisonnée, la chirurgie arboricole…

La période de taille variera en fonction de la taille choisie.

Pour une taille en vert (avec foliaire présent), on pourra tailler toute l'année, sauf période de stress hydrique (manque d'eau), ainsi que le moment de la chute des feuilles et du débourrage, qui sont des périodes sensibles chez les ligneux caduques. Pour des tailles d'entretien complet (mise à nu du végétal), on attendra le repos végétatifs (hiver). Les répercussions des tailles d'entretiens en périodes de gel sont encore mal connues chez les ligneux.

3.3. Les maladies

Le chancre coloré est une maladie grave qui cause la mort chaque année de nombreux platanes. Le champignon responsable de cette maladie est classé parasite de lutte obligatoire ce qui signifie qu’il n’existe pas de moyen de lutte efficace et que le signalement de tout sujet contaminé ainsi que la mise en place des méthodes de lutte sont obligatoires en tout temps et en tout lieu. L’agent responsable de cette maladie est un champignon, Ceratocystis platani.

La Mineuse du Marronnier, Cameraria ohridella, le principal responsable de la chute prématurée des feuilles, est la chenille du papillon Cameraria ohridella, plus communément appelée « mineuse du marronnier ». La chenille mineuse du marronnier, insecte ravageur pour ces arbres emblématiques est en recrudescence dans nos régions.

L'érable du Japon se révèle aussi particulièrement sensible à la verticilliose, une redoutable maladie cryptogamique présente dans certains sols.

Le bombyx du chêne. Le Bombyx est le plus important ravageur des forêts de chênes. Qu’il soit appelé “Moine”, “Cul-Brun” ou “Laineux”, le Bombyx est un défoliateur très polyphage ; il s’attaque à de nombreuses feuilles particulièrement aux chênes et même à d’autres résineux

Le phytophthora, dépérissement des conifères. La pourriture des racines et de la tige peut affecter les conifères mais également d’autres végétaux (rhododendrons, azalées, bruyères…). Ce fléau qui s’est beaucoup développé en pépinières ces vingt dernières années à diverses espèces de conifères d’ornement entraîne des pertes considérables. Parmi les espèces les plus touchées, le thuya.

4. Les outils de suivi des arbres en ville

4.1. Les Systèmes d’Information Géographique (SIG)

Le développement des SIG du patrimoine arboré est essentiel pour construire sa politique de suivi et une gestion raisonnée implique indubitablement la connaissance précise et le suivi régulier de l’état du patrimoine arboré.

Le recensement des arbres doit permettre de géolocaliser chaque sujet et de lui attribuer un certain nombre de données (description, environnement, équipements, interventions, état…). Ces donnes analysées permettent d’anticiper les problèmes, dévaluer ou réorienter les volontés et stratégies.  L’objectif est de disposer d’une part, d’un véritable outil d’aide à la décision et d’autre part, d’un instrument de communication permettant de partager l’information avec l’ensemble des acteurs territoriaux (élus, habitants, associations, techniciens) dans un principe de transversalité.

4.2. La charte de l’arbre en ville

On peut y retrouver les principes suivants :

  • Diversité : La Charte de l’arbre vise à utiliser au mieux les espèces et variétés d’arbres que l’on peut planter dans la région, aussi bien dans un souci esthétique qu’écologique. En effet, la diversité d’essences renforce la qualité esthétique du paysage, préserve la richesse écologique, participe à l’enrichissement culturel et botanique des citoyens et constitue une clef d’adaptation de notre environnement aux changements climatiques.
  • Permanence : Conserver au fil des saisons un paysage attrayant en prenant mieux en compte l’évolution des végétaux, qu'ils soient à feuilles caduques ou persistantes.
  • Durée : Gérer les arbres sur le long terme et augmenter leur espérance de vie. L’espérance de vie des arbres citadins est en effet généralement plus faible que celle qu’ils auraient dans leur milieu naturel d’origine. Mais cette situation peut changer en améliorant les conditions de vie des arbres (eau, sol, etc.).
  • Dynamique du paysage : Grâce à l’évolution continuelle de l’arbre, au fil des saisons et des années, le paysage urbain est en perpétuel changement. C’est cette dynamique qu’il faut anticiper dès la conception de projets d’aménagement, afin de limiter les surcoûts d’entretien et de permettre sur le long terme une forme et une ambiance harmonieuse du paysage.
  • Economie : « Planter, gérer et entretenir mieux et plus pour moins cher » s’inscrit dans la problématique générale de rationalisation des dépenses tant publiques que privées. Ce principe est la conséquence d’une gestion cohérente liée aux premiers principes : nous avons besoin d’une bonne connaissance des arbres pour mieux les gérer, d’un paysage diversifié et résistant aux maladies, permanent, renouvelé régulièrement et durable pour être amorti sur le long terme.
  • Pédagogie : Elle incite à construire une « culture partagée de l’arbre », grâce à l’écoute, l’information, l’acceptation et la participation de tous.
  • Solidarité : L’arbre est porteur de valeurs symboliques très fortes d’altruisme et de solidarité. Exemple : l’arbre comme support d’actions de solidarité (parrainage, etc.).
  • Innovation : Adopter une stratégie de recherche et de développement dans le domaine de l’arboriculture urbaine et du paysage. Les thématiques les plus concernées sont le lien de l’arbre avec le sol, l’eau, le climat et les pesticides et pathologies. Par exemple, un programme de recherche « SCIENCIL » sur l’arbre urbain est basé à la Cité internationale de Lyon.
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